Niger : attaqué de toute part, Mahamadou Issoufou blâme la CEDEAO

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Niger : attaqué de toute part, Mahamadou Issoufou blâme la CEDEAO

Plus d’un an après le coup d’État qui a renversé le président Mohamed Bazoum au Niger, son prédécesseur Mahamadou Issoufou s’est exprimé publiquement pour clarifier sa position sur les événements du 26 juillet 2023. Dans une lettre adressée à la Fondation Mo Ibrahim, l’ancien président nigérien a fermement condamné le putsch, tout en critiquant la réaction de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cette prise de position intervient alors que de nombreux soupçons de collusion entre Issoufou et la junte au pouvoir à Niamey circulent, ternissant l’image de celui qui avait reçu le prix Mo Ibrahim pour un leadership d’excellence en 2020.

Issoufou sous pression pour clarifier sa position

Mahamadou Issoufou, qui a dirigé le Niger de 2011 à 2021, a été jusqu’ici relativement discret sur le coup d’État de 2023 qui a conduit à l’instauration du général Abdourahamane Tiani au pouvoir. Alors que des rumeurs et des accusations de complicité avec les putschistes se multipliaient, l’ex-président a finalement pris la parole, poussé par la pression de la Fondation Mo Ibrahim. Cette institution, qui lui avait décerné le prix 2020 de la gouvernance pour son leadership d’excellence, a exigé qu’il clarifie publiquement sa position sur le renversement de Mohamed Bazoum.

Dans une lettre qui se veut sans ambiguïté, Mahamadou Issoufou réaffirme sa condamnation de tout changement anticonstitutionnel de pouvoir. Il précise avoir déjà exprimé cette condamnation sur les réseaux sociaux peu après le putsch, mais reconnaît que son silence prolongé a pu semer le doute quant à sa véritable position. Cette prise de position vise à lever toute ambiguïté sur son rôle dans la crise nigérienne et à dissiper les soupçons de connivence avec la junte.

Cependant, cette déclaration tardive et formulée sous la pression n’a pas manqué de susciter des critiques. De nombreux observateurs estiment que l’ancien président aurait dû se positionner plus tôt et plus fermement, afin de renforcer la légitimité des institutions démocratiques et de soutenir son successeur légitime, Mohamed Bazoum. Le fait que son propre fils soit détenu depuis l’avènement de la junte n’a fait qu’alimenter les rumeurs sur une possible entente tacite entre Issoufou et les nouveaux dirigeants du Niger.

Entre condamnation du putsch et rejet de l’intervention militaire

Au-delà de sa condamnation du coup d’État, Mahamadou Issoufou a également profité de sa lettre pour critiquer la réaction de la CEDEAO face à la crise nigérienne. L’ancien chef d’État s’est opposé avec vigueur à toute intervention militaire extérieure, qu’il juge dangereuse pour la stabilité du Niger et de la région. Cette position, qui contraste avec celle de nombreux dirigeants ouest-africains, souligne la complexité des enjeux géopolitiques dans la gestion des crises politiques en Afrique de l’Ouest.

Issoufou rappelle que son opposition aux interventions militaires ne date pas d’hier. En 2011, il s’était déjà élevé contre l’intervention en Libye, qu’il considérait comme un facteur de déstabilisation majeure pour le Sahel. « Je suis contre toute intervention extérieure qui serait de nature à déstabiliser le pays et donc à aggraver la situation », a-t-il insisté dans sa lettre. Cette critique adressée à la CEDEAO montre que l’ancien président privilégie une approche diplomatique et négociée pour résoudre les crises politiques, en dépit de la gravité des situations.

La position d’Issoufou a cependant été perçue par certains comme une tentative de ménager la junte au pouvoir à Niamey, ce qui a contribué à entretenir les spéculations sur ses liens avec le général Tiani. Toutefois, l’ex-président a tenu à rappeler qu’il n’a aucun intérêt à soutenir un régime qui maintient son propre fils en détention. Par cette précision, il cherche à se démarquer des accusations de complicité et à souligner qu’il reste fidèle aux principes démocratiques qu’il a défendus durant ses deux mandats à la tête du Niger.

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